Anamnèse

L’interrogatoire du patient souffrant de coccygodynie doit comprendre les étapes suivantes : assurer le diagnostic, préciser l’ancienneté des troubles, chercher une cause et évaluer le retentissement. 

JY Maigne

Assurer le diagnostic : où avez vous mal ?

La douleur de coccygodynie commune présente deux caractéristiques essentielles : elle est localisée à l’aire coccygienne, sans irradiation significative et elle est très augmentée ou n’existe qu’en station assise. Il est donc essentiel de demander au patient de tourner le dos à l’examinateur et de montrer avec un seul doigt la zone douloureuse, qui doit correspondre au coccyx. Toute douleur plus diffuse ou présente indifféremment debout comme assis n’est pas une coccygodynie commune. Parmi les diagnostics différentiels fréquents, citons les douleurs associées à un syndrome dépressif, les douleurs lombaires irradiant au coccyx, le syndrome d’Alcock (névralgie du nerf pudendal), la pathologie anale ou certaines douleurs sacro- iliaques. 

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Préciser l’ancienneté des troubles

Coccygodynie aiguë ou chronique ? Il est important de distinguer entre coccygodynie aiguë et chronique. Les coccygodydies sont d’abord aiguës puis deviennent chroniques, par convention, au delà de deux mois. La prise en charge n’est pas la même selon l’ancienneté des troubles, nombre de coccygodynies aiguës guérissant spontanément en quelques semaines. 

Rechercher une cause

Les traumatismes sont une cause classique de coccygodynie. Cependant, les patients accusent parfois un traumatisme datant de plusieurs années, dont le rôle peut être questionné. Partant du fait que la luxation (cf. infra) était la lésion post-traumatique par excellence, nous avons montré que le temps écoulé (appelé ici délai) entre le traumatisme et le début de la coccygodynie était un élément déterminant. Lorsque ce délai est très court voire nul (cas des coccygodynies après accouchement), la responsabilité du traumatisme est certaine. Elle reste très probable quand le délai est de moins d’un mois. Au delà de trois mois, elle devient improbable.7 Il est important de savoir si le traumatisme est un accident de travail ou non, les résultats du traitement étant nettement moins bons dans le premier cas. 

Les coccygodynies surviennent parfois après des traumatismes modestes (long trajet en voiture, à bicyclette ou à cheval). Chez l’obèse, du fait du surpoids et de la façon particulière de passer de debout à assis (cf. infra), le simple fait de s’asseoir peut être regardé comme un micro-traumatisme répété. D’une façon générale, les coccygodynies post traumatiques sont beaucoup plus fréquentes sur les coccyx droit se déplaçant en extension lors du passage en position assise que sur les coccyx courbes se déplaçant en flexion.7,9 Ces derniers sont en effet relativement protégés lors de l’impact. Il est ainsi probable que, contrairement à une idée reçue, les coccyx en crochet (hooked coccyges) soient moins fréquents dans une population de coccygodynies post traumatiques que chez des sujets sains.

 Mais, à côté d’un possible traumatisme, nous avons montré que d’autres éléments pouvaient orienter sur la cause de la coccygodynie. Ce sont l’indice de masse corporelle (IMC) et la présence d’une douleur au relever.6 

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Index de masse corporelle

La détermination de l’index de masse corporelle est un point important de l’examen clinique car c’est le facteur qui conditionne le plus la biomécanique coccygienne, donc la lésion en cause. Une obésité est très fréquemment constatée en cas de luxation. En effet, lors du passage de debout à assis, la rotation pelvienne sagittale (il s’agit alors d’une rétroversion) de l’obèse est faible. De ce fait, le coccyx se présente plutôt perpendiculairement par rapport au siège, ce qui augmente le risque de luxation. Chez un sujet normal ou maigre, la rotation pelvienne sagittale est plus élevée et le coccyx se présente plutôt parallèlement au siège, d’où le déplacement en flexion et le risque d’hypermobilité. Chez les patients maigres, l’absence de graisse périnéale peut rendre plus agressif un spicule (cf. infra)

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Douleur au relever

La présence d’une vive douleur lors du passage de assis à debout est un signe de lésion radiologique, en général une luxation, parfois un spicule. Comme toujours en matière d’interrogatoire, sa valeur est d’autant meilleure que le patient la signale spontanément.

Présence de lombalgie

Il est important de faire préciser si la douleur lombaire est apparue après ou avant la survenue de la coccygodynie. Apparue après, elle peut être liée aux mauvaises positions que le patient prend pour éviter ou minimiser sa douleur coccygienne. Apparue avant, elle peut avoir joué un rôle dans la survenue de la coccygodynie (cf. infra).  

Evaluer le retentissement

La douleur peut être plus ou moins bien supportée. C’est surtout à l’occasion des trajets en voiture que l’on peut le mieux juger de la gêne, car tous les patients ont mal dans ce cas. Dans certains cas, tout trajet en voiture peut être impossible. Au travail, les patients qui peuvent travailler debout sont évidemment moins pénalisés.

Rechercher des signes d’alerte

Comme dans toute douleur vertébrale, la recherche de signes d’alerte est indispensable, une douleur de la région coccygienne pouvant révéler une pathologie pelvienne ou lombaire grave. Ce chapitre est trop connu pour que nous y insistions davantage. Nous préciserons seulement que l’interrogatoire est en général suffisant et que nous ne demandons d’IRM que si un signe d’alerte est présent.

Examen Clinique

L’examen clinique est plus rapide que l’interrogatoire. Le patient doit être allongé sur le ventre. On cherche d’abord la présence d’une fossette cutanée, voire d’un sinus pilonidal (dont la présence signale celle d’un spicule) dans le pli fessier. On redemande au patient de montrer avec le doigt le siège de sa douleur et l’on essaie de déterminer par la palpation le long du coccyx si le point le plus douloureux (celui dont la pression reproduit le mieux la douleur) correspond à un disque (sacro ou inter-coccygien) ou à la pointe du coccyx, et si un spicule osseux est palpable à ce niveau. 

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L’examen intra-rectal est facultatif (telle est notre opinion). Je le déconseille chez les patients de moins de 20 à 25 ans, car il est très mal ressenti. Chez l’homme, il peut être difficile (donc douloureux) d’atteindre le coccyx par voie rectale. Dans les autres cas, l’examen intra-rectal permet de mobiliser le coccyx et de voir quel mouvement (flexion ou extension) reproduit le mieux la douleur familière.

Le reste de l’entretien doit servir à expliquer la procédure radiologique et thérapeutique. Un diagnostic étiologique est souvent possible à ce stade. A défaut, il est possible d’identifier des éléments en faveur de la présence d’une lésion radiologique (tableau 1 - ci-dessous).

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Conclusion de l'examen clinique

Les coccygodynies récentes (moins de 2 mois) seront traitées avec de simples antalgiques. Les radiographies sont inutiles, sauf si la douleur est très intense (ou liée à un traumatisme violent). La plupart guérissent spontanément. Les coccygodynies chroniques doivent impérativement bénéficier d’un examen radiologique dynamique 

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